Le vent en poulpe

Extrait de l'autobiographie d'une poulpe
"L'issue est un autre chemin. Les corps accueillaient comme des coquillages. Plus de coquillages. Plus d'issue. Danger. Mourir n'est plus réjouissant. Plus d'oeufs, vivre en eaux noires. Plus d'issue. Le poulpe veut manger de la lumière" (p. 86).
Au carrefour de la philosophie (Deleuze, Serres), de la science-fiction (Ursula Le Guin) et des nouvelles études éthologiques, la philosophe Vinciane Despret imagine un futur proche dans lequel s'est développée la "thérolinguistique" ou science des productions littéraires animales. L'ouvrage est publié dans l'excellente collection "Mondes sauvages pour une nouvelle alliance" de l'éditeur Actes Sud, où l'auteure avait déjà donné son passionnant Habiter en oiseau (2019).
"Depuis lors, une multiplicité de créations thérolittéraires et théropoétiques sont venues grossir le corpus de ce que nous appelons aujourd'hui la thérolinguistique classique, que ce soit l'écriture kinétique chorale chez le manchot Adélie ou, pour évoquer les plus récentes, l'archive historique chez l'araignée, la poésie initiatique chez la luciole, le roman souterrain chez la marmotte et l'épopée labyrinthique chez le surmulot" (p. 42).
En trois textes, sur la poésie vibratoire des araignées, sur l'architecture sacrée fécale des wombats, sur le genre aphoristique chez les poulpes, Vinciane Despret nous invite, à la suite de Didier Debaise ou de Bruno Latour sous nos latitudes, à imaginer une nouvelle manière décentrée de l'humain de nous rapporter à notre planète comme espace de vie et surface d'expression des "terrestres".
Et pour l'accompagner, n'hésitez pas à relire chez nous vos poulpesques classiques !
Jean-Michel Durafour